Cormorans

De ce soleil à ma fenêtre
Je ne veux pas
Cet air frais sur mon bras

Dans ce grand appartement vide
Raisonnent des murs sans affiches.
De ces frissons, de l’herbe en friche
Je ne veux plus…

De cet air dans mes poumons
Serrés du chagrin qui m’accable.
Vernis caché dans les chaussons
Mes pieds ne toucheront pas le sable.

Un long bouquin pour oublier
Que passe mon vingt-sixième été.

Refrain :
Si je sors
Le soir ou même à l’aurore
Si je vais
Sur une terrasse au long des quais
Il verra…
Ma faiblesse indissimulable
Il devinera…
Ce secret me rend vulnérable

Peut-être voudra-t-il
Peupler mon univers
M’emmener quelque part

S’inviter dans mon lit
Cet îlot dans la chambre vide
M’apporter le sommeil.

En me voyant, mon père, ma mère
Conviendraient, je l’espère
Que je ne suis venue sur terre
Pour endurer tant de misères
Et vivre si peu de merveilles

J’avais promis plus de lumière
A l’enfant que j’étais hier.
Sur mes nuits blanches, nul ne veille…

Refrain.

Au creux de mon nid, mon île
Silencieux et désertiques
Si je l’attend, viendra-t-il ?
Si peu de place dans l’atlantique
De ma solitude, pour qu’il
S’y jette et s’y noie

Loin de la plage des corps mouvants
Je ne suis plus qu’un corps mourrant
Qui rêve des corps émouvants
Sous le ballet des cormorans

Sauve qui tombe

État d’anesthésie
Fuite en avant
Mutisme et euphorie
Arrêt du temps

Plus forte et libérée
D’une prison intérieure
Refus délibéré
D’affronter ces pleurs

Rendez-moi ce chagrin
Qui sans trêves m’étranglait
Rappelez-moi ce couperet
Sous lequel je pliais
Ôtez le bandeau sur mes yeux
Futiles joies que ce grand feu

D’une telle colère, je ne sais que faire
Contre toutes ces lois délétères
Dans la solitude, me viennent
Des envies d’anarchie bien vaines

Je rêve d’une foule bienveillante
Qui porte, embrasse, et relève
Ceux qui tombent, l’âme vaillante

Clar’a dit

Clar a dit…
Cesse de pleurer, mon ami
Clara dit être une égérie

Fille d’armistice
Née d’un courant pacifique
A vaincu sa soif de justice

Clar a dit…
Sèche tes larmes et oublis
Clara distille une amnésie

Fille de novembre
En signe d’eau, vouivre onirique
Clar fontaine sous le ciel de cendres
Puise à ma source un alambic

Clar a dit…
Laisse les champs fleurir
Clara délaisse les vieux souvenirs

Un clar-obscur au crépuscule
Et Clara vie
Au clar de lune des libellules
Et Clar a dit…
Le chagrin c’est l’envie

Quand Clara crie la clarté d’âme
C’est claire d’esprit que Clar écrit
Et si nul ne croit ce qu’elle clame
Récits deviennent longs manuscrits

J’irais dans ton jardin

Texte poétique dédié à ma grand-mère qui m’a pratiquement élevée, décédée peu après la naissance de mon fils.

Il traite plus largement de l’injonction au deuil.

 J’irais dans ton jardin

Dis, tu me pardonnes ?
Je n’irais pas sur ta tombe
J’irais dans ton jardin

Sous la lumière où tu posais
Dans les iris, tu apparaît

Un drame à retardement
Je sais, je m’y attends

Si je n’ai pas dit aurevoir
Déni du paradis

Pas d’adieu, merci, pardon
Ni je t’en prie, reviens
Dans la voix, par tes dons
C’est toi que je deviens

Je vais donner la vie
Que tu perds, à ce qu’on dit
Et je retrouverais
Sur son visage ton nez busqué
Et c’est à toi que je voudrais
L’annoncer en premier

Je ne taris pas d’éloges
Mais ne pleurs que dans les loges

Pas d’adieu, merci, pardon
Ni je t’en prie, reviens
Dans la voix, par tes dons
C’est toi que je deviens

Je t’en veux, quelquefois
Tout s’envole et t’es pas là
Mais je t’entends me faire la leçon
Je téléphone et tu réponds

Dis, tu me pardonnes
De ne pas fleurir ta tombe ?
Les iris que t’aimais bien
Me sont plus douces à ton jardin

Pas d’adieu, merci, pardon
Ni je t’en prie, reviens
Dans ma voix, par des sons
Parfois tu me reviens

De L’eau sur le divan

  De l’eau sur le divan

Mes yeux fixent les genêts séchés
Dans la corbeille qui a bougé
Depuis jeudi passé

Mes yeux noyés répandent
De l’eau sur le divan
Et mes troubles se distendent
Sous l’eau du bain en rentrant

De votre air ahuris, moi je sourie
A lundi non, mais jeudi oui

J’aime à retrouver ma jeunesse perdue 
L’odeur d’une salle de danse
Quand un fracas me lance
Une balle perdue

Sous les névroses, une vie en rose
Je n’y crois plus

Pour un autre rendez-vous
Ensemble à réveiller l’oublis
Entre mon orgueil et mes flous
Si l’un dit non, moi je dis oui

De vous à moi, je vous en veux
A vos semblables, à votre jeu
Auquel je crois bien trop souvent

Pour cet amour que j’ai perdu
Quand par malheur j’ai confondu
Un canapé, un divan
Si semblables et résolus

Jusqu’au prochain rendez-vous
A torturer mes souvenirs
Je me demanderais, entre nous
Si j’ai tors de revenir

D’ordinaire, je dis passer
Trop de temps en vie dissolue
Mais au contraire, j’ai vu passer
Bien trop d’envies, dissolues

Au terme d’une entrevue
Chez vous à repasser ma vie
Dans ce piège, ne tomberais plus
Vous me saluerez, à jeudi

Je dirais non

     Atelier écriture

Portrait chinois

Printemps 2022

1) Si j’étais un fruit, je serais…
Une pêche blanche.

2) Si j’étais une fleur, je serais…
Le lys.

3) Si j’étais un animal, je serais…
Une biche.

4) Si j’étais une mer ou un océan, je serais…
La Manche, ou l’Atlantique.

5) Si j’étais un parfum, je serais…
Fruité.

6) Si j’étais un bateau, je serais…
Un voilier.

7) Si j’étais un pays ?
La France.

8) Si j’étais un bâtiment ?
Un vieux château à la campagne.

9) Si j’étais une pierre ?
Une pierre de lune.

10) Si j’étais un élément ?
L’eau.

11) Une saison ?
L’été.

12) Un vêtement ?
Une robe longue.

13) Un jour de la semaine ?
Le samedi !

14) Un arbre ?
Un chêne, un châtaigner, un sapin ou un saule pleureur.

15) Une lettre de l’alphabet ?
Le C, le L, ou le M.

16) Une couleur ?
Le violet.

17) Un art oublié ?
La calligraphie.

18) Une époque ?
Le XIXème ou le XXème siècle.


19) Une heure de la journée ?
17, ou 21h.

20) Un objet ?
Une guitare ou un violoncelle.

Complainte du dimanche

Nouvelle insomnie

Sans parasomnie

Sans un somme ni

Un rêve évanouis

Réveil en sursaut

Sans rêve en sursis

Je pars à l’assaut

D’un jour en dents de scie

Refrain :

C’est la complainte du dimanche

Le refrain des nuits blanches

Quand tombent les faux-semblants.

Seul devant sa glace

Faire tomber les masques.

Retrouver la joie d’être soi

Même si ça ne leur suffit pas.

Hymne aux jours sans

Louange aux absents.

En repassant le jour d’avant

Le savourer furieusement.

Tout en clair-obscur

En lumières d’ambre

Je peint mon eldorado

En fille de novembre

En signe d’eau

Sous un clair de lune

Aux reflets de cendres

Sublimer son infortune

Pour mieux redescendre.

Refrain.

Mai-Juin 2022.